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Cahier de confessions : promesses et déceptions ( Nourou Al Amin Niang)

Retrouvez tous les lundis un épisode des Confessions de Nourou Al Amin, professeur de Philosophie au Lycée de Tattaguine

Episode 1 : Sagar

Reçois ce cahier, consignant une partie de ta vie ballotée entre l’aube d’un soleil enjoué et le sinistre couchant d’un soleil pâle, déjoué . Justement, ton vécu a toujours été un cocktail juteux, d’imprevisibilités hallucinantes à couper le souffle.
L’homme peut-il échapper à son fatum? Tu serais bien preneuse d’une échappatoire conduisant à une meilleure issue.
Entre battement et souffle, inspiration et expiration, que l’air soit pur et d’une pureté douteuse, tu t’es battue sans te laisser abattre, et âprement d’ailleurs pour que cesse de te revenir ton passé douloureux, passé auquel je m’identifie pour avoir été ton maître du CI au CM2.
Qui pourrait se targuer de te connaître le mieux?
Génération dorée, belle promotion, une classe avec laquelle je m’étais attaché dès le premier contact, elle sortit de l’élémentaire en même temps que le siècle précédant cédait la place au nouveau siècle vierge d’hivernage avec ses promesses, ses attentes, ses rêves perchés sur une branche haute du nouveau millénaire avec ses illusions, ses déceptions.

Sagar! Pauvre Sagar! Tu venais juste d’avoir onze ans, un inconnu t’aurait ajoutée six, faisant de toi une adolescente alors que tu venais à peine de lâcher le sein maternel.

Bon sang! Tu étais encore une enfant, une toute petite. Tu t’enveloppais dans un corps traitre, envoûtant et ensorcelant, trahissant bien-sûr ton âge!
Sagar, je ne m’étais jamais, dans ma longue carrière, rendu compte qu’un de mes élèves pût un jour me faire verser un ruisseau de larmes. Pourtant, je me savais plus fort, plus retenu, plus professionnel.
Cette émotion ne s’est jamais estompée, ce sentiment ne s’est point émoussé non plus même avec le temps, ce qui nous lie continue de me dépasser en tout lieu, en toute logique.
Dans chaque paragraphe de ce cahier de lettres, dans chaque phrase, dans chaque mot, qu’il soit nom, qualificatif, instrument de musique comme de cuisine, dans chaque souffle de syllabe, dans chaque silence, dans chaque interligne, c’est toute une vie, point rectiligne, la sienne, qui te sera revenue. Je le sais, l’immensité et la complexité de ton vécu, la sinuosité de ton chemin, tout cela ne peut être consigné dans une lettre, et le plus difficile c’est de revivre les situations dans une lecture qui peut durer une éternité, tarissant le puits de tes larmes , dont la profondeur se perd dans des abîmes abyssaux.
Sagar! Oh Sagar! Qui a osé ? Qui?

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