Les faibles résultats et les infractions pénales liés au baccalauréat 2017 doivent nous rappeler que ce diplôme a fait son temps et est inadapté à nos réalités.
Le baccalauréat est le diplôme qui, en France, sanctionne la fin des études du cycle secondaire. Son ancêtre date du 13e siècle avec l’Université de Paris. Le nom serait une altération du bas-latin « bachalariatus » qui désigne un rang de débutant dans la chevalerie ou dans la hiérarchie religieuse et universitaire au Moyen-Âge. Napoléon introduira une réforme en 1808 (huit ans avant le début de la colonisation au Sénégal) qui lui donne ses contours actuels. Il était uniquement réservé aux garçons de la Bourgeoisie et n’a été largement ouvert aux filles qu’en 1924. La France l’introduit dans ses colonies à la fin de la Seconde Guerre en 1945 avec l’appellation Brevet de capacité colonial qui devait s’obtenir en deux parties (en Première et en Terminale).
A l’indépendance, nous avons embrassé ce diplôme médiéval et colonial en lui donnant le nom et le contenu de ceux du colonisateur. Cent-quarante-quatre ans de colonisation (1816-1960) sont largement suffisants pour fabriquer des complexés qui pensent et réfléchissent uniquement par et pour le colonisateur.
Trois évidences nous interpellent. La première est que ceux qui obtiennent le baccalauréat sénégalais ont des niveaux toujours plus faibles en langue, en culture générale et en sciences ; la seconde est que le taux réussite baisse d’année en année (36 en 2016 et 31% en 2017 pour ne prendre que les deux dernières années) ; et la troisième est que le diplôme ne s’obtient plus que par la fraude et la tricherie organisées. Quarante-deux personnes sont présentement devant le juge pour réponde de ces délits.
A l’évidence, ce diplôme colonial qui doit ouvrir la porte à l’enseignement supérieur, a fait son temps et doit tout simplement disparaitre et, avec lui, tout le système scolaire et universitaire hérité de la colonisation qui n’a jamais eu d’autre but que de faire de nous de bons colonisés, méprisant leur propre culture et servant les intérêts exclusifs du colonisateur.
En lieu et place du baccalauréat colonial qui nous prépare, dans une langue qui n’est pas la nôtre, à parler beaucoup et agir très peu, nous pouvons innover avec un diplôme qui assure une qualification et un métier véritables. Nous attaquerions ainsi la déperdition scolaire, le chômage, la sous-productivité et l’échec social de manière précoce et efficace. Beaucoup d’énergies dormantes s’en trouveraient libérées par la stimulation des vocations ; la créativité et l’inventivité s’en porteraient mieux ; bref, le vrai génie sénégalais serait enfin réveillé.
Mamadou Sy Tounkara